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- ITINERAIRE D'UN CORPS -

trio pour un comedien et deux pianistes

    Sur la ligne de départ, il y a une rencontre.

Quelque chose, un soir, qui a lancé la course, qui a fait renaître une envie déjà là depuis longtemps, sous-jacente.

Un événement inattendu qui a fait germer l’idée de transformer la marche, quotidienne, en objet d’étude.

En matière à penser.

En matière à expérimentations, à rêves, à récits.

En tentative de réponse au monde.

    Un soir, alors que j’attendais une amie sous la colonne gauche de la place de la Nation, histoire d’aller boire un verre, un homme est apparu devant moi. J’étais seule, debout, immobile ou presque, dans l’ombre. Lui portait un long trench beige qui bougeait avec ses pas, et semblait arriver de quelque part, ou de partout à la fois. Puis, une question : « A votre avis, à quoi cela sert de continuer à vivre ? ».

    Pendant dix minutes, nous avons détaillé la marque de chewing-gum incrustée dans le bitume entre nos pieds. Nous avons plissé les yeux, et nous avons trouvé sa forme, sa matière si belles. Nous nous sommes dits que les détails de nos villes, ceux qu’on ne voit plus, méritaient d’être regardés autrement. Que la beauté était peut-être banale, avant tout. Et qu’il nous fallait arpenter, encore, pour découvrir ce que la ville avait à nous offrir.

 

    Je ne sais pas où est parti cet homme. Mais une idée m’est venue : pour arriver jusqu’à moi, ce soir-là, cet homme avait peut-être  marché depuis bien loin, et la question qu’il m’avait posée était sans doute le résultat de cette traversée.

Je me suis donc lancée dans le projet de reconstituer sa marche, à lui, par une marche, la mienne.

D’imaginer un protocole qui reproduirait le trajet de son corps, avec ses découvertes, sa poésie et sa fatigue.

Un itinéraire entre réalité et fiction.

Il s’assied alors à la terrasse d’un café,

quelques tables en face d’un grand bâtiment en pierres, incongru à cet endroit-là de la ville, mais idéal pour poser son regard sur les marcheurs qui passent désormais devant lui, visions éphémères et théâtrales, mille vies qu’il imagine et compare à la sienne.

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     La démarche sûre, un homme sait qu’on le regarde.

D’où vient-il ? Ou va-t-il ?

Et ces dizaines de voix autour de lui, l’ont-elles vu elles aussi ?

Sûrement ont-elles imaginé une autre vie à l’homme en blanc, un autre nom, une autre musique.

Il y a mille façons d’entrer dans un corps. 

Crédit photos : Roxane Mirza

Extrait / Le Rêve

- ITINÉRAIRE D'UN CORPS -

Texte, musique et image, piano : Gabrielle Marty

Jeu : Matthieu Astre

Conception sonore, piano : Colombine Jacquemont

Conceptions lumière et vidéo : Roxane Mirza & Zoé Dada

Projet de diplôme : Juillet 2017/ ENSATT - Lyon

Suite de la création : 2025

Extrait du texte et de la musique dans le podcast Mange Tes Mots

Épisode n°18 - Ocean Vuong

-> Écouter le podcast sur Spotify <-

Ce projet est soutenu par le Collectif Les Immergés.

Détail des étapes de création sur le site du Collectif

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Une question a filé dans la nuit.

Il a ouvert la bouche,

en quelques mots il est devenu personnage.

Cette marche est peut-être la sienne.

Cette marche est peut-être la mienne.

Cette marche est sûrement la nôtre.

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Ce projet s'accompagne d'un mémoire portant sur la question de la marche urbaine :

Aperçu, p. 22-23 sur 273

© Gabrielle Marty

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